#un autre monde5
" Jean dut se plier au rite de l’initiation pour la conception. Il n’avait pas la moindre idée de ce que cela pouvait être. Il se posa la question, de savoir ce qui pouvait être différent. Lui et Iris étaient pourtant bien des êtres de chair. Comment s’y prenaient-ils dans ce monde, pour concevoir les enfants. Il pensa, que cela devait être terriblement ennuyeux. Il se souvint de l’attitude altière d’Iris, quand elle se fit connaître à lui. Certes était-elle marrante maintenant, mais il doutait de la légèreté de l’initiation.
" Iris s’en alla dans un coin de la maison. Elle voulut être seule pour commencer. Elle devait retrouver l’énergie qui était la sienne, avant qu’elle devienne une simple " mortelle ". Elle puisa toute son énergie aux plus lointaines forces de l’univers, quelque part dans un lieu, où le temps et l’espace n’ont pas de valeur. Où " rien " ne veut rien dire, et où " tout " est rien à la fois. Indéfinissable ! Mais hautement efficace pour l’énergie personnelle.
" Jean se décida d’aller vers elle. Il voulut, à tout prix, savoir les secrets les plus intimes de sa compagne. D’où parvenait-elle à puiser sa force? Avant qu’il ne parvienne à l’entrée de la pièce où se trouvait Iris, le sentant se rapprocher, elle lui dit :
" N’approche pas ! Reste en dehors de cette chambre. Ce qui va arriver, tu ne pourrais le supporter ! "
" Aussitôt la porte se referma entre lui et sa compagne.
" Un sourd murmure lui parvint aux oreilles. La maison recommença à vibrer. Une lueur apparut sous le pas de la porte. Elle ne tarda pas à envahir tout le couloir. Il eut l’impression que les murs disparaissaient de sa vue. Il fut pétrifié. Que se passait-il dans la chambre ?
" Iris, Iris, que se passe-t’il ? Je ne voie plus la porte ni rien que ce soit ! Je t’en prie, dis-moi quelque chose, que tout va bien... "
" Il tâtonna pour trouver une issue, un passage qui le ramènerait vers Iris. Mais rien. Elle ne lui répondait pas. La peur de l’irrationnel reprenait le dessus. Même tous les événements qu’il avait endurés jusque là, n’étaient rien à côté de ce qu’il vivait en ce moment. Ne pas perdre Iris, était sa seule pensée. Ne pas se retrouver devant une autre que celle qu’il aimait. Des larmes commencèrent à couler au bord de ses yeux. Il baissa la tête, résigné. Jamais il ne connaîtrait le bonheur d’un amour éternel. Elle aussi changerait et il resterait avec ses illusions.
" Peu à peu, l’intensité de la lumière se dissipa. Les murs et la porte réapparurent. Ils étaient sauvés, pensait-il. Certainement qu’elle l’avait entendu... La porte se rouvrit comme elle s’était fermée. Iris était au centre de la chambre, encore enveloppée d’une lumière étrange.
" Les quelques flammèches qui parcouraient son corps se resserraient au milieu de son ventre. Et d’un coup elles disparurent ! Jean accourut vers Iris. Il ne voulait plus rester sans savoir. Elle avait encore les yeux dirigés vers cet endroit secret de l’univers qu’elle était seule à connaître. Au contact de Jean, elle détourna son regard, et le plongea dans celui de Jean. Elle n’avait pas changé. C’était toujours la même Iris, avec cette expression de l’amour le plus profond, qui brillait au fond de ses yeux. Il la prit dans ses bras, la serrant le plus fort qu’il pouvait. Elle posa sa tête sur son épaule, et lui murmura quelques mots pour le rassurer.
" Qu’as-tu fait ? Je te croyais perdue, emportée encore une fois par cette lumière étrange. Ne me laisse pas seul sans savoir qui tu es et ce que tu peux faire. Tout cela me fait peur. J’ai pas l’habitude de ce genre de phénomènes. "
" Elle lui prit la tête entre les mains et dit :
" Ne crains rien amour de Jean. Jamais tu ne seras seul, tant que je serais avec toi. Mes pouvoirs seront limités pour que nous puissions vivre ensemble. Mais pour les besoins de la conception, il fallait que je renouvelle une force qui n’était plus en moi depuis fort longtemps ."
" Jean se posa la question suivante : ce qu’elle venait d’accomplir, se devait-il de le faire aussi ? Elle lui répondit que non. Ce qu’il avait reçu la dernière fois, était en lui pour toujours. Il ne lui fallait, que se concentrer correctement sur ce qu’il désirait, et elle reparaîtrait comme par enchantement. Jean lui rappela, qu’il n’avait pas pu en user pour restaurer la maison. Alors, pour concevoir un être, vu la difficulté, il se demandait bien comment il pourrait y parvenir.
" Ne doute pas de tes capacités. Dans ce monde tu peux faire des choses et d’autres te sont interdites. Agir sur la matière avec la force de l’esprit, pour des besoins futiles, n’est pas une nécessité. Tu peux agir avec tes bras, tes jambes. Tu as le pouvoir de transformer le lieu où tu te trouves. Mais pour ce qui est de la conception, c’est ton esprit qui génère le changement. C’est la même force qui vient d'au-delà des mondes, qui te donne le pouvoir de création. C’est cette force que tu devras trouver. Elle est en toi pour toujours. Seulement elle sommeille et tu ne sais où la chercher. "
" Iris prit Jean par la main et le conduit vers un autre endroit de la maison. Ils arrivèrent devant une pièce qu’il n’avait même pas remarquée quand il avait visité les lieux pour la première fois. Ils se trouvèrent devant une porte sur laquelle figuraient d’étranges inscriptions. Elle était ornée de pierres précieuses qui lui donnait l’aspect d’un kaléidoscope géant. Tout autour, des frises d’un métal ressemblant à de l’or, dessinaient des fleurs s’entremêlant.
" C’est ici que tu retrouveras ton don de conception. Je t’assisterais pour que tu te sentes en sécurité. Tu n’as rien d’autre à craindre que toi-même. "
" Elle fit un geste de la main et la porte disparut, leur laissant le champ libre. La pièce qui se trouvait derrière n’avait pas de fenêtre, mais une lumière diffuse l’emplissait totalement. Quand ils eurent franchi le seuil, la lumière se fit plus intense. Au centre, apparaissaient huit colonnes de cristal chapeautées d’un dôme en or transparent comme du cristal. La lumière environnante variait du bleu au rose doré, sans jamais se fixer sur l’une ou l’autre couleur. Ce lieu avait quelque chose de reposant pour l’âme. Malgré ses réticences, Jean ne ressentait plus aucune angoisse. Elle était avec lui, et il sentait que rien ne pouvait lui arriver.
" Vas au centre des colonnes, lui dit-elle. Crois en ta force et laisses- toi aller. "
" Elle lui lâcha la main qui glissa contre la sienne. Il ne voulait pas en être séparé. Mais il le fallait. Leurs deux regards complices se suivirent, dernières paroles muettes avant l’épreuve. Jean s ’approcha des colonnes. Il écarta les bras et les effleura du bout des doigts pour s’assurer qu’elles étaient bien réelles. Oui ! Ce n’était pas un rêve. Elles étaient bien là, posée sur le sol attendant qu’il se trouve en leur centre. Une prison ouverte, une prison de cristal pensait-il. Une prison dans laquelle il pénétrait de plein gré, et dont il espérait ressortir dans le même état qu’il y entrerait. Un dernier regard vers Iris. Un dernier sourire timide, et il se plaça au centre des colonnes. Quand il fut en place, aussitôt l’intensité de la clarté s’amplifia. Encore une fois, tout ce qui se trouvait autour de lui disparut dans la lumière. Mais, il ne ressentit plus sa vieille ennemie, la peur. Il savait qu’Iris était là, quelque part près de lui, qu’elle attendait la fin de l’épreuve. Il tourna sur lui-même, comme pour chercher une issue, une image de quoi que ce soit. Rien. Rien cette lumière tout autour. Juste un léger bourdonnement qui lui faisait penser, que quelque chose se passait. Il sentit son esprit se vider et se remplir d’images qu’il n’avait même pas le temps de comprendre. Formes et couleurs n’avaient plus aucune signification. Le plus étrange fut, qu’il se laissa complètement aller. Passif, sans cri, sans larme, sans émotion. Une douce épreuve en quelque sorte. L’éclat disparaissait peu à peu. Iris commençai à réapparaître. L’épreuve s’achevait...
" Jean ressortit aussi libre qu’il était entré dans sa cage de cristal. Il lança un dernier coup d’œil, la bouche de travers. Il ne ressentait rien. Il semblait presque être déçu. Ca, la force de conception ? Mais ce n’est rien à côté de tout le reste, pensait-il.
" Iris l’accueillait, les bras grands ouverts. Elle souriait. Il souriait aussi. Et sans dire un mot, ils quittèrent cet endroit pour un autre...
" Maintenant, ils étaient prêts, pour que s’accomplisse le rite de la conception. Jean attendait les conseils d’Iris.
" Essaie d’oublier tout ce que tu as encore en mémoire sur la conception des êtres..."
" Elle se retourna, se plaça, le dos contre la poitrine de Jean.
" Enveloppe-moi de tes bras, et pense très fort au désir de conception. "
" Jean s’exécuta. Il n’avait pas le sentiment, que ce qu’elle lui demandait, pourrait faire quelque chose. Mais il avait confiance. Elle savait ce qu’elle faisait. Tout alentour était sans bruit. Les mains de Jean étaient posées sur le ventre d’Iris. Au bout d’un moment il sentit ses doigts qui s’échauffaient. De légers picotements les firent vibrer. Iris ferma les yeux. Elle aussi ressentait la chaleur de cette force qui sortait de Jean pour la remplir. Elle bascula la tête en arrière. Sa longue chevelure dorée recouvrait l’épaule de Jean. Elle posa ses mains sur celles de Jean. Aussitôt, elles furent recouvertes d’une lueur verte. Une petite bulle de lumière se forma, se concentrant de plus en plus. Formée, elle s’éleva dans les airs, tout en restant le plus prés possible du ventre d’Iris. Jean était calme. Il n’avait jamais rien vu de semblable, mais il était serein. Iris avait toujours les yeux fermés. Quand elle consentit à les rouvrir, ce fut pour enlever les mains de Jean qui se trouvaient toujours sur son ventre. Alors, elle caressa doucement la petite bulle de lumière verte, comme pour lui dire qu’elle devait rester prés d’elle. La bulle s’en alla vers Jean... Elle tourna tout autour de lui, s’arrêta un instant tout net devant ses yeux, puis s’en retourna vers sa place d’origine, où elle disparut pour un moment. Iris regarda son ventre et ressentit des frissons, comme depuis longtemps elle n’avait eu à les ressentir. Une intense émotion se propagea depuis le centre de sa poitrine, et irradia tout son être, jusqu’à la faire partager avec Jean. Un bonheur immense les emplit. Ils avaient réussi à partager ce sentiment d’amour, et ils en étaient encore entièrement remplis l’un et l’autre. Rien n’avait été perdu. Iris se retourna vers Jean, ses yeux brillaient comme jamais au par avant. Elle l’embrassa langoureusement...
" Et maintenant, demanda Jean ? "
" Maintenant ? Il va falloir attendre que cela grandisse, lui répondit-elle. "
" Jean se demanda, si cela durerait aussi longtemps que dans son ancien monde. Iris lui répondit que non. Tout dépendait de Celui qui sait.
" Aussitôt, la bulle de lumière verte réapparut sur le ventre d’Iris, et doucement elle commença à s’allonger.
" Quelques jours passèrent, sans que la bulle ne se soit trop enflée. Elle était toujours posée sur le ventre d’Iris, mais à l’intérieur, ils purent distinguer la formation d’un petit être qui commençait à leur ressembler.
" Ses yeux étaient déjà grands ouverts. Jean fut émerveillé par ce prodige. Il était le spectateur privilégié d’une chose qu’il n’avait jamais pu voir... Seulement imaginer. Il s’approcha de cet enfant, son fils, d’un monde nouveau aux croisées d’univers. D’un univers qui avait des lois différentes, mais semblables dans leurs fondements. La conception se poursuivait dans le même sens. Seule l’acte avait été différent, mais combien plus intense que ce qu’il avait connu avant.
" Tous les trois vivaient ces moments de tendresse, partagés entre un père, une mère, et leur enfant. Ils partagèrent un amour étant la somme des trois autres, sans être supérieur à un seul des trois.
" L’enfant, qui grandissait dans sa bulle, n’avait pas reçu de nom. Auraient-ils pu l’appeler Amour ? Ce prénom lui irait si bien...
Johanna interrompit Théodore :
" Moi aussi mes parents m’appellent amour, mais je m’appelle Johanna ! "
Théodore eut un sourire complice et tendre à la fois.
" Tu sais Johanna, tous les enfants reçoivent un prénom de leurs parents, mais tous s’appellent Amour. Car ils sont le fruit de l’Amour. "
" Même quand je fais des bêtises, reprit-elle ? "
" Même quand tu fais des bêtises, tu ne cesses pas d’être un Amour, ma puce. Et si tes parents te grondent, c’est, pensent-ils, pour ton bien ."
Johanna remit son pouce dans sa bouche tout en tortillant son bout de tissus blanc qu’elle ne quittait jamais. Les autres enfants la regardaient en riant, lui disant : " Chut !. .. Amour... " Théodore reprit son récit :
" Jean et Iris vécurent ainsi, attendant le moment où l’enfant se séparerait de sa bulle de lumière.
" Un matin, alors qu’ils étaient tous deux encore endormis, ils furent réveillés par un étrange gazouillis. Amour était couché entre eux deux, libéré de sa bulle verte. La tendresse du regard des parents se porta vers ce nouveau-né d’une ère nouvelle. Tout était à faire. Tout était à naître. Iris savait, que, Celui qui sait les aiderait à élever cet enfant, et que tout alors serait possible.
" Durant le temps qui s’écoulait, Jean apprit autant de choses que son enfant. Les sentiments qui les rapprochaient n’avaient pas changés. L’amour était intact. Ils formaient une seule et même personne et rien n’aurait pu leur arriver.
" Pourtant, Jean sentit, que cet enfant ne pouvait pas rester seul. Certes, il avait des parents qui l ’aimaient, qui le choyaient, mais il restait le seul enfant de ce monde. Il ne pouvait pas grandir seul. Alors, Jean demanda à Iris, s’il ne serait pas possible qu’ils conçoivent un deuxième enfant. Iris redoutait cette question. Elle savait ce qui devait arriver si cette idée de Jean venait à se réaliser. Mais, quelque chose de plus fort qu’elle lui imposa d’accomplir ce qu’il demandait. Telle était la voie.
" Le deuxième enfant vint au monde comme le précédent. Ils le prénommèrent Aimé. Mais déjà ses parents pouvaient sentir une différence avec l’aîné.
" Ils l’avaient conçu, pensaient-ils, avec la même force que le premier, mais Iris n’avait pas eu le même désir. Aussi cet enfant ne venait-il pas au monde avec la même force d’amour que l’autre. Jean et Iris tentèrent de les élever sans qu’aucune distinction ne soit faite. Mais, ils étaient tous deux tellement différents. C’était deux beaux garçons, aussi forts l’un que l’autre, et qui emplissait de joie, par leurs jeux et leurs rires, l’endroit où ils se trouvaient.
" Un jour pourtant, la merveilleuse lumière de ce monde commença à décroître doucement. Les enfants étaient devenus grands. Ils leur avaient enseigné tout ce qu’ils devaient savoir pour rester les gardiens d’un monde fabuleux. Ils pouvaient se sentir en harmonie complète avec ce qui les entourait. Mais, pour l’un d’eux, il y avait une force qui le poussait plus avant. Il pensait ne pas être fait pour rester là toute l’éternité, sans que rien change. Il dit à ses parents, qu’ils avaient bien changé l’ordre des choses en les mettant au monde. Ne pouvaient-ils pas faire de même ? Alors il demanda à ses parents, qu’elle était la raison de sa présence. Quelle était la force qui les avait poussés à le concevoir ? Iris ne voulait pas répondre. Jean ne s’était plus posé la question. La seule chose qu’il savait, c’était qu’il avait voulu faire voir le jour, matérialiser un sentiment très fort, l’amour.
" Aimé ne parvenait pas à comprendre ces raisons. Il savait que, Celui qui sait n’agissait pas en pure perte. Sa présence en ce mode devait avoir un sens. Autrement quoi ?
" Il s’éloigna de plus en plus de ses parents et de son frère. Il passait de longs moments à penser quelle était l’origine de son père, ainsi que celle de sa mère.
" Ainsi, après une longue réflexion, sur ce qui avait été le monde de son père, il sentit le sens caché de la voie qui s’ouvrait devant lui. Avec sa connaissance, les pouvoirs de ce monde, pouvait-il devenir le Maître d’un autre monde où les êtres étaient si fragiles. Là, pensait-il être d’une plus grande utilité qu’ici. Il fit part de sa décision à ses parents, ainsi qu’à son frère. Iris le mit en garde contre cette décision qui comportait bien des dangers, et qui pouvait aller contre les desseins de Celui qui sait. Certainement que, s’il poursuivait sur cette voie, un grand malheur frapperait ce monde, et qu’il devrait en subir les conséquences.
" Jean ne savait que répondre. Il avait été heureux de vivre en parfaite harmonie avec sa compagne et ses enfants. Jamais il n’avait eu l’idée, qu’il pourrait y avoir de changement. Il ne le désirait pas. Il avait trouvé la sérénité qu’il avait toujours cherchée, et pour rien au monde, il aurait voulu que cela change.
" Amour tenta de raisonner son frère cadet. Mais rien n’y fit. Il avait pris sa décision. Il fallait que s’accomplisse la destiné, la sienne...
" Une profonde tristesse s’empara d’Iris. Elle avait tout tenté pour que cet événement ne se produise pas. Elle se sentait coupable de tout ce qui allait arriver. Elle se retourna vers Celui qui sait, qu’il l’aide. Qu’il aide ses enfants dans leurs choix ! Mais il ne répondait pas, il restait distant pour la première fois, aussi, des larmes de tristesse coulèrent sur les douces joues d’Iris. Jean s’en aperçut. Il la prit dans ses bras pour la consoler, lui dit que rien de ceci n’était bien grave. Il ne savait pas... Il ne savait pas, que la force de ce monde ne tolérait pas que la sagesse universelle une fois révélée se disperse ailleurs. Elle devait rester dans l’éternité. Il ne savait pas, que transformer cette sagesse et cette connaissance universelle en créant une existence, c’était mettre fin à cette éternité. Ceci, malgré le désir d’amour que l’on veut partager.
" Le ciel se couvrit des ténèbres. Tout ce qui était alentour commença à disparaître. Une lumière verte s’empara d’Aimé et l’engloutit. Il avait conçu de lui-même ce mode de transport d’un monde à un autre. Il ne leur avait même pas dit adieux...
" Ne restaient que Jean, Iris, et Amour. Malgré ce qui les unissait, ils ressentaient une certaine inquiétude. Jean commença à ressentir ses anciennes angoisses. Devait-il, encore une fois, perdre ce bonheur qu’il avait rencontré ? Iris et Amour le regardaient. Il leur était impossible de faire quoi que ce soit. L’image de Jean se dissolvait peu à peu. Il disparaissait de ce monde, ses mains cherchant à se raccrocher à Iris qui ne parvenait pas à le retenir. Ne pas la perdre ! Ne pas les perdre ! Même la grandeur de son amour ne pouvait rien empêcher. Aimé avait effectué une déchirure. Jean en était la victime involontaire. Terrible souffrance que d’être séparé de ceux que l’on aime. Terrible souffrance de ne pas avoir d’espoir de se retrouver. Terrible souffrance de ne pas avoir su ce qui allait arriver.
" Le visage d’Iris, en larme, serait son dernier souvenir d’un bonheur sans nom. Mais ce souvenir était aussi celui de la tristesse.
" Iris savait que cette autre partie d’elle n’était pas perdue pour toujours. Ce ne serait pas facile d’accéder au monde de Jean, sans intervenir plus qu’elle ne le pouvait. Elle savait que cela serait possible, un jour. Le jour où Jean retrouverait la mémoire.
" Ce jour là, sans le savoir, il l’appellerait et elle se manifesterait à lui. Ils ne pourraient se toucher, mais se voir, se voir rien qu’un instant. Retrouver l’échange de ces regards tendres, qui effacent toutes douleurs de la séparation. Oui, ils se retrouveraient, tous ensemble comme auparavant.
" Amour sera là pour te récupérer ! "
" Ce furent les dernières paroles que Jean put entendre avant de disparaître complètement...